Sun’ Agri et ses cultivateurs de kilowatts font main basse sur les Pyrénées-Orientales

Sun’ Agri et ses cultivateurs de kilowatts

font main basse sur les Pyrénées-Orientales

 

« Quand vous êtes dessous, il y a une structure, je ne trouve pas cela moche, ensuite s’il y en avait dans tous les champs à perte de vue, c’est comme les éoliennes, je trouverais cela moche bien sûr. Je dirais « non mais cela suffit, j’en ai ras-le-bol ». Ainsi s’exprime le patron du lobby France Agrivoltaïsme, Antoine Nogier, chantre médiatique de « l’ agrivoltaïsme exigeant-harmonieux-vertueux » avec sa boite Sun’ Agri, pour qui a été écrit la loi du sénat en faveur de « l’ agrivoltaïsme » aujourd’hui intégrée à la loi d’accélération de la production des énergies renouvelables.

Sun’ Agri n’est pas n’importe qui. Depuis une décennie 25 millions ont été investit dans des programmes de recherches conjoints avec l’INRAE. Ainsi « l’histoire de l’agrivoltaïsme en France commence en 2009 par la rencontre d’Antoine Nogier, président et fondateur du groupe Sun’R et de Sun’Agri, et de Christian Dupraz, chercheur en Agroforesterie à l’INRAE »1.

Pour mieux faire passer leur projet abscons, les promoteurs de ce concept marketing n’ont cessé d’y ajouter des critères afin d’essayer de distinguer cet « agrivoltaïsme » du vulgaire photovoltaïque au sol. Leur but étant que 150 000 hectares soient recouverts. Une surface revendiquée tant par le Ministère de la Transition que par ce lobby.

Ainsi, 7 labos de l’INRAE et 14 chercheurs à temps plein ont bossé des années avec Sun’ Agri, mais aussi avec Photowatt et Itk, et ce avant que Sun’agri ne se lance sur le marché. Aujourd’hui Sun’ Agri est une succursale d’ Eiffage, et présente son « programme 3 » subventionné à 7 millions par l’ADEME et qui lui permet la construction de démonstrateurs à l’ échelle commerciale.

Raflant 75% des appels d’offre de la CRE, Nogier fanfaronne et dénonce « les cow-boys qui parcourent la pampa » des autres entreprises, mais achète pourtant des terres via sa boîte, à minima 80 hectares dans les Aspres, refuse de l’assumer et s’en défend en se présentant comme « engagé dans une initiative à but social consistant à remettre en état d’exploitation des vignes délaissées ou sans repreneur dans une exploitation modernisée et pérennisée ». Auprès de ses pairs, il se fait pourtant plus direct « nous sommes maintenant dans le business. Nous sommes développeurs et investisseurs, c’est une activité très capitalistique ».

Et alors que sa directrice prône la vertu, Sun’Agri fait un Recours Gracieux pour imposer ses 2 projets aux élu.es de Terrats qui avaient délibéré contre à l’unanimité. Nogier, boute-en-train, tente alors un calembour « la mairie ne s’oppose pas. Il y a eu des questionnements au début. Sur Terrats il y a pas de sujet, elle est plutôt pour la mairie. L’agrivoltaïsme c’est assez peu connu donc cela suscite beaucoup d’interrogation, et cela nécessite beaucoup de pédagogie ». Et bien que l’agrivoltaïsme ne fasse qu’ajouter à la dépendance à l’agroindustrie une autre dépendance aux industriels de l’énergie, Nogier se fait renard dans un poulailler : « Il y a autant de systèmes agricoles que d’agriculteurs. Tout le monde a le droit de faire des choix différents ».

Quant à son intermédiaire local, Christophe Koch, s’il fut à l’origine de la première centrale agrivoltaïque d’Europe qui a reçu les honneurs de Greenpeace, il prône l’autonomie des pratiques agronomique pour lui-même et contribue à aliéner les autres paysans et paysannes aux algorithmes de sun’agri…

  • Mais du coup, est ce que vous ne pensez pas que les panneaux ne sont pas forcément à la bonne place et qui faudrait favoriser une véritable agroforesterie, une diversification des parcelles en termes de cépages et d’arbres fruitiers ?
  • Mais bien sûr, mais bien sûr.
  • Mais pourquoi ne pas faire chez les autres ce que vous faite chez vous ?
  • Parce que chez moi je peux décider, je suis décideur.
  • Oui mais là on en revient au point de départ. Vous perdez l’AOC, donc quitte à perdre l’AOC dans ces projets de sun’agri, autant mettre des arbres et des abricotiers, non ?
  • Non mais enfin là c’est pas moi qui décide.
  • Mais vous travaillez avec ces sociétés-là.
  • (silence) non mais moi je conseille…

 

On pourrait lui conseiller d’arrêter de mettre en place des projets à 800 000 euros par hectare. Des centrales industrielles dont « l’algorithme qui gère à distance depuis le siège lyonnais de l’entreprise maîtrise parfaitement le comportement de la plante ». Nogier fanfaronne que « Sun’ Agri c’est un fournisseur de technologie d’intelligence artificielle. Notre métier c’est celui-là, on est une boîte de technologie ».« Le cœur du réacteur de Sun’Agri, c’est le numérique »2 jubile t’il par ailleurs. Pourtant « je prétend que nous on essaye de maintenir les terroirs tels quels. Non je ne suis pas de ceux qui penses que les systèmes connectés, la technologie sont l’ennemi de l’agriculture, au contraire ils peuvent aider l’agriculteur à dormir correctement sur ses deux oreilles, à avoir moins de stress et à faire un métier qui est extrêmement difficile. Ce sont des agriculteurs qui se sont réappropriés leur agriculture, leur métier et la technologie les aide » assène le PDG de Sun’ Agri. Il ose aussi présenter le salarié agricole qui sera sous ses panneaux comme un acteur indépendant alors que la société d’exploitation agricole est détenue par Sun’Agri.

En termes de convergence d’intérêts dans les Pyrénées-Orientales, l’écosystème « vertueux » des barons de la FNSEA et de la Coordination Rurale – dont Sun’ Agri recueille les fruits – fiche une insolation. Si le parrain de la FDSEA, Bruno Vila fort de ses millions, de ses 50 sociétés donc 5 agrivoltaïques, surclasse de loin son compagnon de route Philippe Maydat, président de la Coordination Rurale qui ne détient que 2 petites locations, ce dernier se permet une paella conviviale sous les serres de Ternergie. Ces deux syndicats sont présents à la Chambre d’agriculture, à la SAFER, à la CDPENAF, des instances décisives pour les projets de Sun’ Agri.

7 mois après le début de ce papier dont la version courte parue dans L’Empaillé a été lue par les commerciaux de Sun’Agri qui cherchent maladroitement à s’en défendre, la mairie de Fourques se déclare contre le 3eme projet de Sun’ agri et cherche à le bloquer. Face à la boîte d’Antoine Nogier qui n’avait pas prévenu des habitant.es que les chantiers et les lignes électriques allaient passer dans leurs terrains, des chaînes empêchent Sun’Agri d’accéder aux chantiers. La première réunion d’information contre la succursale d’ Eiffage se tiendra à Terrats le 28 février à 18h.

Dans les Aspres, tout le monde est en train de détester Sun’ Agri.

 

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https://ccaves.org/blog/wp-content/uploads/main-basse-sur-les-Pyrenees-Orientales-1.pdf

 

Loïc Santiago.
Merci à Dorothée Lebrun pour son reportage photo !

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